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Femmes en Astronomie / Astrophysique - Partie 2



Le siècle des lumières (1715 - 1789) - La place des femmes dans le monde scientifique
Source : https://www.dictionnaire-creatrices.com/


Le siècle des lumières est une époque marquée par les prémices de l’évolution de la place des femmes dans les domaines scientifiques. En effet, les femmes à cette époque pouvant participer à la production artisanale, certaines d’entre elles décident de se lancer dans les sciences de l’observation, l’astronomie en particulier.





Maria Margarethe Kirch, née Winkelmann (1670 - 1720) est une astronome allemande, l’une des plus célèbres de son époque. Instruite par son père qui pensait qu’elle mérite la même éducation que les garçons, puis formée à l’astronomie par l’astronome autodidacte et paysan Christoph Arnold dont elle devient l’assistante, elle rencontre le célèbre astronome Gottfried Kirch via Arnold et l’épouse en 1682. Les femmes n’ayant pas accès aux universités à l’époque, elle continue à étudier l’astronomie auprès de Gottfried et travaille en équipe avec lui mais est considérée aux yeux du public comme son assistante.


Source : https://principia.blog/

Les différentes observations et calculs de Maria et Gottfried permettent de produire les calendriers, éphémérides et plus tard les almanachs. Elle devient en 1702 la première femme à découvrir une comète encore inconnue, la “comète 1702” (C/1702 H1). Le crédit de cette découverte fut cependant attribué à Gottfried à l’époque et ce dernier ne rétablit la vérité qu’en 1710. Entre 1707 et 1712, elle continua à publier des articles scientifiques sur les aurores boréales et les mouvements de certaines planètes.





Après le décès de son époux en 1710, étant une femme, elle se voit refusée le poste anciennement occupé par son époux (astronome et concepteur de calendrier) à l’Académie Royale, malgré le soutien de Leibniz qui en était le président à l’époque.

Ce conflit entre Maria et l’académie soulèvera auprès de l’opinion publique la question de la place des femmes dans les domaines scientifiques, réservés aux hommes pour les gens de cette époque car entrant en contradiction avec les tâches domestiques qui sont elles réservées aux femmes.


Source : https://www.futura-sciences.com

Les questionnements sur la place des femmes, de plus en plus récurrents, firent naître 3 camps : Ceux qui pensent que les femmes sont inférieures aux hommes sur les plans intellectuel et social, ceux qui pensent qu’hommes et femmes sont égaux mais différents, et ceux qui pensent que les femmes sont potentiellement égales aux hommes dans leur contribution à la société. L’existence du débat permit aux femmes de faire de nombreux progrès en sciences, notamment Émilie du Châtelet (1706 - 1749), qui fut la première à réaliser une traduction française du Philosophiæ naturalis principia mathematica, le fameux ouvrage d’Isaac Newton publié en 1759 (après le décès de l’auteure) sous le titre “Principes Mathématiques de la Philosophie Naturelle.

Philosophe, mathématicienne et physicienne, Émilie du Châtelet était une grande figure du siècle des lumières. Fille de Louis Nicolas Le Tonnelier, baron de Breteuil, elle reçut de ce dernier une éducation similaire à celle de ses frères. Elle apprit ainsi durant son enfance et son adolescence à Paris les mathématiques, la philosophie naturelle (la physique), plusieurs langues (latin, allemand, grec ancien), la musique, etc… En 1734, elle devint la compagne de Voltaire, qui conscient de son potentiel l’encouragea à continuer à étudier les sciences et à y contribuer par ses travaux. Elle participera aussi à la formation scientifique de ce dernier.


Elle participa ainsi à des discussions scientifiques après s’être déguisée en homme pour accéder au Café Gradot à Paris afin d’en tourner le règlement au ridicule. Hormis l’Académie des sciences de Paris qui était interdite au femmes, les lieux de discussion/échange des scientifiques notoires étaient les cafés parisiens, également interdits aux femmes, d’où sa démarche. Elle travailla également avec Voltaire sur de nombreux sujets dont la popularisation les théories de Newton qui furent introduites en France par Pierre Louis Moreau de Maupertuis et un mémoire sur la nature du feu, sujet sur lequel Voltaire et Émilie ne partageaient pas les mêmes idées. Le mémoire d'Émilie devint de part sa qualité le premier ouvrage écrit par une femme et publié par l’Académie. Elle se lança plus tard dans la traduction du Philosophiae naturalis principia mathematica d’Isaac Newton y ajoutant à la fin un commentaire algébrique (calculs faits par elle même) et une description du système planétaire.



Source : www.gallicia.bnf.fr

Dans l’ouvrage intitulé Institutions de Physique, Émilie du Châtelet réalise une analyse comparative et tente de concilier la physique de René Descartes, d’Isaac Newton et la métaphysique de Gottfried Leibniz afin d’en tirer les nouvelles idées de la physique. Cet ouvrage, initialement pensé comme un manuel pour on fils, deviendra l’oeuvre majeure de sa vie et fut publiée en 1740, éditée par Prault fils à Paris. De part ses travaux, elle fut élue membre de l'Académie des sciences de l'institut de Bologne (la seule à cette époque à admettre des femmes) le 1er Avril 1746.



Après son décès en 1749, Émilie du Châtelet fut cependant connue pendant très longtemps comme ayant été la compagne de Voltaire et non comme la savante qu’elle était. Un destin similaire était réservé à d’autres femmes astronomes dont Caroline Herschel, restée pendant longtemps dans l’histoire dans l’ombre de son frère William Herschel.


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Caroline Herschel (1750-1848) est née à Hanovre en Allemagne dans une famille de musiciens et est la huitième enfant et quatrième fille de sa famille. Elle est atteinte à l’âge de 10 ans du typhus, qui limitera sa taille à 1,40 mètre. Sa mère Anna Ilse Moritzen estimant alors qu’elle ne trouvera pas de mari décide qu’elle deviendra servante dans la maison familiale. Son père Isaac Herschel quand à lui souhaite qu’elle soit éduquée comme les garçons afin d’être indépendante plus tard. Il décide donc à l’insu de son épouse de mêler Caroline aux leçons dispensées aux garçons et lui enseigne les mathématiques la musique et le français avec ses frères et des métiers comme la couture. Après le décès de son père en 1767, elle devient la ménagère responsable de la maison familiale, avant d’être amenée à Bath en Angleterre en 1772 par son frère William. Elle y entame une carrière de chanteuse, encouragée et formée par William lui même musicien professionnel (organiste et chef de chœur titulaire de l'Octagon Chapel de Bath), et devient très populaire.


Source : wikipedia

William Herschel était aussi astronome amateur et réclamait souvent l’aide de sa soeur (elle était sa ménagère à l’époque) qui travaillera plus tard avec lui en tant qu’assistante. Il lui enseigne les mathématiques dans ce but. Sa passion est telle qu’il finit par abandonner son métier de musicien pour se consacrer à l’astronomie. Caroline quand à elle le secondait en réalisant des tâches comme la copie des tables astronomiques, l’enregistrement des données et la conception des instruments d’observation. Il devint célèbre après avoir découvert avec sa soeur la planète Uranus qu’il avait d’abord nommé Georgium Sidus en l'honneur de George III.


Après la découverte d’Uranus le roi George III décide de faire de William Herschel son astronome personnel. Celui-ci déménage alors pour Datchet en 1781, confiant la maison à sa soeur et l’encouragea en 1782 à observer seule. C’est ainsi qu’elle observa de nombreux objets célestes entre 1783 et 1787 et découvrit l’amas stellaire NGC 7789 (appelé la Rose de Caroline) et la galaxie NGC 205 (Messier 110), satellite de la galaxie d'Andromède, puis découvre 8 comètes entre les années 1786 et 1797. Elle réalise dès 1797 un Catalogue d’étoiles publie en 1798 par la Royal Society, qui corrige les décalages de positions d’étoiles entre les observations de William Herschel et celles de John Flamsteed. En 1828, elle complète le catalogue de nébuleuses et d'amas stellaires, Zones of all the star clusters and nebulae observed by Sir William Herschel de son frère.

Tous ces travaux lui valurent de nombreuses récompenses dont la Médaille d'or de la Royal Astronomical Society reçue en 1828 pour ses travaux avec son frère. Elle fut en 1835 l’une des deux premières femmes (avec Mary Somerville) à être élue membre honoraire de la Royal Astronomical Society. Elle devint aussi membre honoraire de la Royal Irish Academy de Dublin en 1838.

Le roi George III avait décidé en 1787 de lui accorder une retribution de annuelle de 50 £ pour ses services scientifiques en tant qu’assistante de William, faisant d’elle la première femme payée pour services scientifiques. Elle est donc la première femme est exercer officiellement le métier d’astronome professionnelle.


Malgré toutes ces distinctions et de part l’attachement de Caroline Herschel pour son frère William celle-ci demeurait toujours dans son ombre. Elle souffrait en effet d’un manque de confiance en elle qu’elle a développé pendant sa période de servitude à la suite du décès de son père. Cet effacement devant William et le fait qu’elle soit une femme (opinion publique encore défavorable à la présence des femmes en sciences) sont la cause de sa quasi absence dans l’histoire de l’astronomie malgré que ce dernier lui laissait le mérite de son travail ; contrairement à Alexis Claude Clairaut qui avait auparavant omis de mentionner le nom de Nicole-Reine Lepaute dans la liste des calculateurs de la Théorie des comètes publié en 1760 la maintenant également dans l’ombre.


Nicole-Reine Lepaute, née Étable (1723 - 1788) est une astronome française née au palais du petit Luxembourg dans la famille Étable dont la plupart des membres servent des familles nobles européennes en tant que valets. Très jeune elle est autodidacte et s’intéresse aux sciences. En 1749, elle épouse l’horloger Jean André Lepaute, et à travers lui fera la connaissance de l’astronome Joseph Jérôme Lefrançois de Lalande qui, en 1753, encouragera Jean André Lepaute (horloger dur roi à cette époque) à se lancer dans la conception de pendules astronomiques. C’est ainsi que Nicole-Reine fera ses premiers pas dans le domaine en calculant les tables d’oscillations du pendule pour lui.

Vint alors le temps du retour de la comète de Halley, prédit auparavant par Edmund Halley en se basant sur les lois de Newton. Alexis Clairaut et Lalande décident de prédire la date exacte du retour de la comète en se basant sur la solution approchée du problème des trois corps de Clairaut. Lalande et Lepaute s’occuperont des énormes calculs nécessaires, calculant du matin jusqu’au soir pendant 6 mois (selon Lalande). Le retour de la comète sur fit finalement le 13 mars 1759 à un mois de la date qu’ils avaient prévue (le 13 avril). Ceci est un énorme succès pour l’équipe qui prouve que l’hypothèse de Halley selon laquelle les comètes pouvaient revenir était vrai mais qu’en plus on pouvait prédire la date de leur retour. En 1760, Clairaut publie sa Théorie des comètes omettant cependant de mentionner le nom de Lepaute, influencée par son épouse qu’il ne voulait pas rendre jalouse en mentionnant le nom d’une autre dans ses recherches. Lepaute n’est mentionnée à aucun moment dans l’ouvrage bien qu’ayant réalisé des calcul pour la prédiction du retour de la comète. Cet acte marquera la fin de l’amitié entre Lalande et Clairaut.



Page des Éphémérides pour l'année 1775

Lepaute secondera également Lalande (réalisant des calculs) dans sa mission de réalisation d’éphémérides astronomiques que lui a confié l’Académie des sciences en 1759 qui sera publié sous le titre La connaissance des temps. Elle est admise en 1761 par l’académie de Beziers.



Elle accompagne une nouvelle fois Lalande en 1774 dans la réalisation de l’ouvrage Éphémérides, autre recueil d’éphémérides dans lequel Lalande mentionnera son travail, notamment les calculs de Saturne pour le tome 7 et les calculs du soleil, de la lune et des planètes pour le tome 8. Elle se consacre dès 1768 à la formation en astronomie et mathématiques de son neveu Joseph Lepaute Dagelet qui sera élu adjoint astronome en 1785 à l’Académie royale des sciences.

Nicole-Reine Lepaute astronome de renom à son époque avait toute fois un profil assez particulier par rapport à Émilie du Châtelet, par exemple. Elle était en effet très spécialisée dans les calculs et était connue comme une “calculatrice” de génie par ses contemporains. Il s’agit là des prémices d’un tournant important que connaîtra le monde de l’astronomie dans les périodes suivantes.



À suivre......


Rédigé par Bryne T.



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